Chronique-billet d'humour autour de la crise de la Covid-19 (20, 21...)
9 Avril 2020
S1E24
"All the world’s a stage, and all the men and women merely players ; they have their exits and their entrances, and one man in his time plays many parts..."
Le monde entier est un théâtre, et tous les hommes et les femmes seulement des acteurs ; ils ont leurs entrées et sorties, et un homme dans le cours de sa vie joue différents rôles...
William Shakespeare, As You Like It (Comme il vous plaira, Acte II Scène 7).
Ce blogue étant public et ses lecteurs ne me connaissant pas tous, à part neuf abonnés, six potes, trois sœurs, deux neveux et un mec empégué sur la toile, je vais me présenter humblement et vous dire qui je suis, en tout cas ce que j’en sais, d’après des informations vérifiées trois fois par mes sources.
Je suis né à Talence, sur les boulevards, c’est n’importe quoi, entre Noël et le Jour de l’An, donc n’importe quand. Un quart landais du nord, un quart girondin de l’est, un quart lot-et-garonnais de l’ouest et un gros tiers bordelais du sud. Quand j’étais petit, entre deux chocs pétroliers et un aller-retour à Piraillan-Forêt, mon géniteur lisait le Canard enchaîné. C’était au temps des diamants de Bokassa et du suicidé Robert Boulin. Le journal Pilote, où sévissaient Goscinny et Uderzo, tombait sous mes yeux ébahis. À 13 ans, j’ai créé mon premier journal satirique, il s’appelait Heure de Colle. Hara Kiri, Charlie, Fluide Glacial et l’Écho des Savanes ont façonné mon esprit névrosé, mon sens critique, et vice-versa. Aujourd’hui, à part la belle revue XXI et toujours le Monde diplo, j’ai du mal avec les journaux des autres. J’ai aussi été créateur et scénariste éphémère d’une BD où des poscayes se substituaient aux humanoïdes. C’est tombé à l’eau et j’ai fait des tours de bocal à la fac de lettres jusqu’à me noyer dans un verre d’eau tiédasse. Mes grandes idoles et petits rapporteurs de la comédie humaine ont tour à tour mis l’arme à gauche : les Pierre, Étaix, Dac, Repp et bien sûr Desproges, Francis Blanche et Jean Yanne, Coluche et Devos, Rouxel et ses Shadocks, Reiser et Gotlib, Bruno Carette et Augusto Pinochet. À ce jour, Jean-Jacques Sempé, ce vieux Pessacais de mes fraises, est le seul survivant, ou presque.
Devenu journaliste sur le tard et sur le tas, j’ai pigé assidûment et créé en l’an 2000 un torchon du nom de Nouvelles vagues, soutenu par les copains utopiens. Y ont sévi quelques rédacteurs plus ou moins talentueux, les dessinateurs Urbs, de mauvaise réputation, désormais dans le Sud Ouest et déchaîné en quelque mercredi dans le Canard, et Barros, Bar pour les intimes, comme moi trop sensible et écorché pour évoluer dans un monde de clairvoyants opportunistes. J’ai brutalement perdu mon pépère repère pervers, puis lancé un prototype de site d’info sans modèle économique, Cityzen Mag, qui s’est glorieusement écrasé au décollage. J’ai fait deux bambins alors qu’au départ je n’en voulais surtout pas : "À partir de combien de millions d'enfants morts est-on en droit de douter de l'infinie bonté de Dieu ?" Je ne regrette pas mes ados, ils produisent ma jouvence. Et puis : "Les femmes et le bordeaux, je crois que ce sont les deux seules raisons de survivre" (merci monsieur Cyclopède). Tant qu'il en restera quelques gouttelettes.
Dans les dernières années, j’ai tenu sans trop y croire (je suis agnostique) un rade altermondialiste, pseudo-militant et écolo-compatible. En résumé, une usine à gaz. Un 7 janvier, nous avons perdu Cabu, Wolinski, Charb, Tignous, Honoré, Bernard Maris, etc., et nos dernières illusions pour un moment. Le 13 novembre augmenté du 14 juillet, c’était pour toujours. Ma mère s’étant discrètement effacée, mon ami d’enfance tiré, j’ai fini par céder mon commerce avec joie et non sans peine à de jeunes imbéciles avides et sans scrupules. Leur rideau de fer est baissé pour cause de lâche pandémie et je ne peux pas les plaindre, c’est plus fort que ma compassion. Un burn out et un arbre généalogique plus loin, j’ai repris la plume que je n’avais pas vraiment quittée. Et me voili ou me voiçà avec ce blog de confiné de canard, m’attelant chaque jour à faire sourire en coin coin ou à connecter les synapses de mes compagnons d’infortune. Nous sommes confits par l’overdose d’approximations verbeuses et contradictoires des décideurs et des médias sérieux, concentrés et subventionnés par nos soins. Nous méritons mieux : des canaux qui montreraient la réalité crue et diraient toutes nos vérités.
Comme mes contemporains, je reprends contact avec les copains d’avant le chaos, enchanté de refaire leur connaissance, je poste ma photo innocente sur les réseaux, je me sens comme dans un amphithéâtre bondé en première année de médecine et je rase les murs. Enfin, j’attends en fumant sur la terrasse que les chauve-souris du coronavirus nous lâchent la grappe pour reprendre une vie quasiment normale. Jusqu’à la prochaine fois. Bonne lecture, abonnez-vous au blog (c'est gratuit), partagez s'il vous plaît et cliquez sur les pubs, ça me fera peut-être gagner quelques brouzoufs (c'est pour le chien). Je vous embrasse sans masque et sans geste barrière.
Stay alive.
FD
Sans supplément de prix :
"Plus belle la vie"
Le top 50 de ce qui ne nous manque absolument pas pendant le confinement :
L’omniprésence des Bordeluches et des Parigos au Cap Ferret
Les chroniques boursières à rallonges sur France Inter
Le sourire béat de Jean-Pierre Pernaut à 13 heures (il est revenu ? merde)
Les injonctions à la consommation des panneaux en quatre par trois
Le nuage de pollen de la forêt de pins des Landes de Gascogne
La queue aux tire-fesses des stations de ski alpin et pyrénéen
Les concerts en plein air de Pascal Obispo à La Rochelle
La drague lourde des mecs bourrés au Blue Night Dancing Club
Les commentaires niais et les pop corns des voisins au cinéma
Les "c’est vrai que…" et "voilà" des interviews de sportifs
Les vociférations haineuses et xénophobes des supporters de foot
Les zones commerciales bétonnées et bondées le samedi après-midi
Les "que du bonheur" de nos contemporains ravis de la vie
Les files de bagnoles aux moteurs allumés au drive du Macdo
Les bateaux à moteur et jet skis sillonnant le bassin d’Arcachon
Le couloir à camions de la rocade et de l’autoroute nord-sud
Les applaudissements enregistrés ou forcés à la télévision
Le ballet ininterrompu des avions dans le ciel de Bègles ou d’Eysines
Le harcèlement incessant des démarchages téléphoniques à la maison
Les coups de klaxons intempestifs de tous les cons pressés
Le parfum entêtant de la pouffe sur-maquillée dans le tram
L’haleine fétide de Jean-Mi qui fait quatre bises au bureau
Le marteau-piqueur qui démarre pile au moment de la sieste
L’agression du réveille-matin en plein coeur d’un rêve érotique
Les bateaux de croisière bouchant la vue devant le miroir d’eau
Les navets à succès affligeants du théâtre des Salinières
Le mariage de Kelyn et Nolan chez les cousins relous de Guéret
Les "en mode...", "steuplé", "de ouf" et "déso" des jeunes imbéciles
Les « c’était mieux avant » ou « de mon temps » des vieux cons
Le dilemme au restaurant : "je lui laisse un pourboire ou pas ?"
Les élucubrations des commentateurs sur les frasques de Neymar
La joie éternelle du curé de la paroisse à la messe de 11 heures
Les profs de français des enfants avec des cheveux gras ou rouges
Les cailleras qui traînent et dealent au skate parc du quartier
Les invitations de convenance chez les amis d’amis qui votent RN
La culpabilité de regarder la télé ou de squatter les chiottes
Le repas dominical chez belle maman à pétaouchnok-les-oies
Les avis et conseils sans intérêt de mon voisin d’en face
Les réponses sibyllines et gaffeuses de Sibeth Ndiaye (elle est revenue ? merde)
Le coucher de soleil à l’océan avec un con de nuage juste devant
Le bus de 7h43 qui passe à 48 et me fait embaucher à la bourre
Le rendez-vous tinder qui fait matcher un futur conjoint violent
Le chef de service sans vie perso qui lance un debriefing à 16h57
Le connard qui roule à deux à l’heure quand j’ai envie de pisser
Le cambrioleur qui attend mon départ pour rentrer par la véranda
Le morbac dont s’est entiché ma fille qui vient sonner à la porte
La tournée des activités de loisirs des gosses le mercredi aprèm
La roulette du dentiste nazi qui répète que c’est sans danger
Le raisonneur énervant qui se permet un "y’a pas mort d’homme"
Le plombier ukrainien qui baise ta femme quand t’as le dos tourné
Tchin !
FD